Animateur : Thierry
Temps de préparation : Itinéraires et CR = 5h – Préparation des repas et courses = 6h
Transport : en co-voiturage, 3 voitures A/R de Montferrand à Meursault et A/R de Meursault à Chambolle-Musigny et A/R de Meursault à Pernand-Vergelesses
Kilométrage autos : 2124 km pour 3 voitures
Météo : Beau temps – grand soleil le vendredi – soleil couvert avec 5 mn de pluie le samedi – assez ensoleillé mais plus frais le dimanche
Carte : 2739 OT
Classement Atlas : Facile
Nombre de participants : 12 animateur compris (7 F, 4 H)

Jour 1 :

Boucle autour de Chambolle-Musigny, Morey-Saint-Denis et Gevrey-Chambertin : 14 km – 380m D+ – 5h45 déplacement
Petite boucle autour de Vosne-Romanée : 2 km – 1 heure de déplacement

Après un départ très matinal, une belle chevauchée autoroutière et une installation dans notre grand gîte à Meursault nous arrivons à l’horaire prévu, à Chambolle-Musigny au nord de la Côte de Nuits. L’objectif des trois jours est la découverte des 32 Grands Crus de cette partie de la Bourgogne viticole et de leur terroir respectif. Sans anticiper la narration de notre dernier jour, on peut dire que l’objectif a été atteint.

Initialement prévu en linéaire tout au long du GRP des Grands Crus, de Gevrey à Santenay, la complexité dans l’organisation des transports m’a conduit à dessiner 3 boucles qui nous ont permis d’atteindre l’objectif.

Au programme de cette première journée, la découverte des vignobles des 4 grandes AOC (Appellation d’Origine Contrôlée) de la Côte de Nuits : Gevrey-Chambertin, Morey-Saint- Denis, Chambolle-Musigny et Vosne-Romanée soient 6% de la surface de la Bourgogne Viticole. Cette grande région commence plus au nord et se termine plus au sud de nos lieux de découverte du week-end. En effet, elle commence à Chablis dans l’Auxerrois, couvre le Chatillonais, puis les Côtes de Nuits et de Beaune au sud de Dijon puis, plus au sud la Côte Chalonnaise et le Maconnais pour se terminer aux portes de Lyon dans le Beaujolais. La totalité de ces vignobles occupe près de 31000 hectares soient près de 4% du vignoble français. La première heure de rando va nous faire toucher du doigt les caractéristiques géologiques et physiques de la Côte de Nuits. En effet nous quittons le village par une petite route qui s’enfonce dans la Combe. Cette sorte de vallée sèche est caractéristique des paysages des Côtes. Il faut remonter 170 millions d’années en arrière, au Jurassique, pour en retrouver l’origine. A cette époque une mer tropicale, chaude et peu profonde recouvrait la Bourgogne actuelle. Pendant des millions d’années, la décomposition des coquillages et autres plantes marines a donné naissance à des sédiments qui se sont accumulés pour former de vastes plateaux une fois les terres émergées. Le plissement alpin qui se produit il y a 30 millions d’années provoque un effondrement de la vaste vallée qui allait de l’Alsace au Beaujolais et fait apparaitre un mince talus et ses pentes, reposant sur le socle calcaire et recouvert d’une fine couverture d’argile. En même temps, ces grands mouvements géologiques ont fissuré le socle pour créer ces échancrures qu’on appelle aujourd’hui des combes. Les glaciations du quaternaire ont fini de modeler le paysage en recouvrant les coteaux de sédiments et cailloutis, surtout le haut et le milieu des pentes, pour créer des terrains argilo-calcaires propices à la vigne. En Côte de Nuits comme en Côte de Beaune, l’orientation principale des coteaux est à l’est ; ils bénéficient du soleil dès son lever et jusqu’au milieu de l’après-midi. Autre facteur important, ces coteaux sont protégés des vents et autres intempéries par le massif du Morvan plus à l’ouest.

Il nous faut donc remonter sur le plateau, près de 80 m au-dessus à travers une faille. Il faut y mettre les mains avec quelques pas d’escalade plus ou moins simples suivant les personnes.

Finalement après un peu d’effort, tout le groupe prend pied sur le plateau en direction de Gevrey au NW. Le cheminement rappelle à certains les paysages du Causse Méjean : pas étonnant puisque les origines géologiques sont proches. Après avoir traversé une nouvelle combe, nous trouvons un petit chemin qui doit nous amener au vignoble et à nos premiers « climats » de grand cru, le Clos de Bèze et Chambertin. On appelle « climat » en Bourgogne une parcelle clairement identifiée par son terroir. S’y jouent des interactions physiques et humaines : physiques avec le cépage (Pinot noir pour les vins rouges et Chardonnay pour les vingt blancs), l’exposition, la hauteur sur le coteau, la composition du sol ; humaines avec la façon de le cultiver, de le protéger avec les murs, les Clos et de faire le vin. Ce lien si fort entre un terroir et un vin se retrouve dans les 84 AOC recensées en Bourgogne, près de 25 % de tous les vins AOC de l’hexagone. La superficie moyenne des parcelles des grands crus de Gevrey est ainsi de près de 9 ha. Un domaine moyen en Bourgogne est de 8 ha. Ces parcelles ne sont pas nouvelles : le type de culture de la vigne en Bourgogne a été façonné par les moines des abbayes de Cluny et de Cîteaux à partir du 12ème siècle. Cîteaux n’est située qu’à 15 km de Vosne-Romanée seulement. Ce sont eux qui les premiers ont construit ces parcelles et développé cet art de cultiver la vigne et le vin. La Révolution changera le mode de propriété mais pas le découpage en « climats » ni  l’héritage des traditions et du savoir-faire lentement élaborés. Les vins de Bourgogne étaient déjà réputés dans l’Europe occidentale dès le Moyen-Age ; renommée portée par l’influence des Ducs de Bourgogne sur tout le nord du continent puis poursuivie par les rois de France. Napoléon ne jurait que par le Chambertin… Pour rendre particulier chaque morceau, chaque parcelle de ce terroir rien ne vaut le nommage. C’est ainsi que chaque parcelle de vigne de ces Côtes, surtout parmi les Grands et Premiers Crus, porte un nom qui peut venir de :

  • la composition du sol : les Pierrières, les Cras (terrain pierreux) …
  • la configuration du terrain : les Combettes, la Pièce sous le Bois, les Bonnes Mares …
  • la végétation : les Charmes, les Genévrières …
  • du nom d’un ancien propriétaire : Chambertin, le champ de monsieur Bertin …

Avant de pénétrer presque religieusement sur ces « terres sacrées », nous profitons des derniers arbres du bois en surplomb pour prendre notre pause méridienne : le soleil est encore chaud. A l’issue, nous partons à la rencontre de nos premiers ceps. Ces parcelles produisent des rouges de grande puissance aux textures et arômes complexes. Tous les Grands crus de Gevrey sont au sud du village et sur le haut du coteau. Rien ne ressemble plus à une vigne qu’une autre vigne. Il nous faut un peu d’imagination pour faire la relation entre ces vignes et le prestige des vins auxquels elles donnent naissance. Le vignoble semble comme au repos dans une campagne endormie. On est loin en cette mi-octobre de l’agitation de septembre et de la période des vendanges quand des centaines de personnes arpentent les rangées et quand des dizaines de fourgons de transport blancs sillonnent les petites routes ou stationnent au carrefour des domaines et des parcelles. Car il ne se passe pas grand-chose en octobre du point de vue de la viticulture. On se livre principalement à l’arrachage et au défonçage. Arrachage des vieux ceps ou des ceps morts. Le défonçage est le nettoyage du terrain, racines et cailloux (épierrage) sont extraits par une charrue spéciale appelée défonceuse. L’arrachage est de rigueur en cet automne à la vue des pieds identifiés par de la rubalise : autant de rubans autant de ceps à arracher .

L’impact du changement climatique se fait déjà sentir… A Meursault, nous verrons même une parcelle entière ceinte de rubalise comme sur une scène de crime. Octobre, c’est aussi le moment de préparer les trous pour les nouveaux plants plantés en novembre ou avril à l’aide d’une pioche ou d’une tarière.  

Nous quittons Gevrey-Chambertin pour nous diriger vers Morey-Saint-Denis plus au sud en suivant toujours le même chemin d’exploitation. Nous trouvons deux ouvriers d’un domaine. Ils nous confirment la nature du travail effectué pendant ce premier mois d’automne. Il est également question d’amendement des sols par apport de fumier épandu comme dans n’importe quel potager… Nous avons remarqué sur certaines parcelles un palissage qui ne ressemble pas au palissage typique des Côtes, à savoir un palissage à trois niveaux de fil, fil inférieur, double fil intermédiaire pour le remontage (voir plus bas) et fil supérieur.  Sur ces parcelles les fils sont doublés sur chaque niveau et la disposition des sarments sur le palissage est différent de la disposition classique liée au type de taille appliqué le plus souvent, la taille dite « Guyot », du nom du médecin viticulteur qui l’inventa au milieu du 19ème siècle. Après cette taille, deux baguettes (longues branches) subsistent et partent vers le haut de la vigne.

Les sarments qui pousseront à partir des yeux conservés sur chaque baguette seront les branches fructifères… Cette façon de faire aérerait plus le pied au printemps et en été et limiterait l’apparition de maladies cryptogamiques. Selon nos ouvriers, ce sont des expériences qui rapporteraient gros car les vins de cette parcelle se vendraient très chers ! Petit village moins connu que ses voisins, Morey abrite pourtant 4 Grands Crus comme le Clos de la Roche et le Clos Saint-Denis.

Les appellations de Morey illustrent bien l’influence de la géologie sur la « grandeur » des vins :

  • en bas de coteau, les Villages dans la partie plate très argileuse.
  • au milieu : les 1ers crus un peu plus pentus sur une fine couche d’argile et une roche calcaire pas trop loin : les Ruchots.
  • au-dessus-vers le bord du plateau : les Grands crus sont dans la pente et sur la roche. Le Clos de la Roche s’étale sur un sol fortement calcaire : à peine 30 centimètres de terre, un peu de cailloutis et des gros blocs de pierre qui lui ont donné ce nom. Le Clos Saint-Denis : en bas du coteau repose sur des sols bruns calcaires dépourvus de cailloutis, avec une forte présence d’argile.

Je reviendrai sur le pourquoi et le comment des appellations de Bourgogne au jour 2…

Avant Chambolle-Musigny que nous contournons à l’ouest, nous longeons la belle parcelle en Grand Cru des Bonnes Mares un peu plus basse dans la pente… A proximité de l’ouverture de la Combe d’Orveaux, nous découvrons le château de Vougeot au milieu de ses vignes :

le fameux domaine du Clos de Vougeot.  Grande parcelle de près de 51 ha créée par les moines de Cîteaux au 13ème siècle et leur propriété jusqu’à la Révolution. Aujourd’hui ce climat est partagé par 85 propriétaires différents qui se partagent les 1740 hl en moyenne chaque année…. Le Clos est entouré d’un mur de 3,5 km.

Nous retournons à Chambolle pour reprendre nos voitures et rouler quelques kilomètres plus au sud vers Vosne-Romanée où nous attendent nos derniers Grands crus de la journée.

Ce sont les vins rouges les plus célèbres au monde avec quelques vins de Bordeaux : ils ont pour nom Romanée-Conti Romanée, Richebourg et plus au nord, les Grands Echézaux. Ce sont de petites parcelles : 1,81 ha pour la Romanée-Conti et 8,3 ha pour les Richebourg.

La faible production de Romanée-Conti, 49 hl, en font un des vins les plus chers au monde : on n’en produit que 4000 à 6000 bouteilles par millésime. C’est le Prince de Conti qui acheta en 1760 la parcelle dont le vin était déjà fameux et reconnu. A sa mort, on donna son nom à la vigne. Une bouteille de Richebourg millésime 1985 fut adjugée à une enchère à Hong-Kong à 65 000 euros 😊 !!!

Les propriétaires de ces Grand Crus sont de fortes personnalités à l’instar de Henri Jyer un des propriétaires des Grands Echézaux et d’une minuscule parcelle juste au-dessus, le Cros Parentoux, 1er Cru d’1 ha à peine mais un des meilleurs vins du monde. Dans certains classements internationaux ces Grand Crus de Vosne-Romanée trustent les premières places et relèguent loin derrière les Grands Bordeaux. Henri Jyer décédé en 2006 était un visionnaire. Opposé de longue date au recours aux substances chimiques, à la filtration, partisan du faible rendement (seulement environ 3 500 bouteilles par an), il est l’inventeur de la macération pré fermentaire à froid (voir jour 2). Il existe un beau portrait de ce vigneron sur Youtube : https://www.youtube.com/watch?v=GEHBTAJrKSc&ab_channel=lotelduvin que je vous encourage à voir 😊. Son ami-concurrent, propriétaire de la Romanée Conti, Aubert de Villaine est aussi une personnalité plus discrète mais reconnu mondialement.

Après cette riche journée, il est temps de rentrer au bercail pour un apéritif et un repas partagé en toute convivialité. Les Atlassiens font un sort au bœuf bourguignon (of course) et aux crumbles du dessert.

Jour 2 :

  • Boucle autour de Pernand-Vergelesses : 12 km – 250m D+ – 4h08 déplacement
  • Parcours dans Beaune : 2 km –  1h30 déplacement
  • Boucle autour de Pommard et Volnay : 5 km – 144m D+ – 1h15 déplacement

Je propose aujourd’hui au groupe plusieurs séquences qui nous permettent de suivre notre objectif de découverte des Côtes et de leurs Grands crus. Une visite de la cuverie du vigneron propriétaire du gîte est prévue à 17 heures. Il faut donc que le planning de la journée soit bien calé😊. Direction de bon matin Pernand-Vergelesses avec l’objectif de faire le tour de la montagne de Corton sur les pentes desquelles poussent nos Grands Crus.

Mais avant, un petit tour au cœur du vignoble de Pernand s’impose. Nous remontons au nord la grande combe qui mène à Echevronne. A la sortie du village devant une cuverie nous tombons sur un pressoir qui vient d’être utilisé il y a peu… Pas de grands vins sur ce versant orienté à l’ouest. Par contre nous découvrons des parcelles atypiques avec des espacements inter rangées de près de 2 m et des ceps aux palissages tout en hauteur.

Notre hôte nous expliquera le soir que c’est pour limiter l’emploi de main d’œuvre (il y a moins de ceps à travailler à l’hectare – pour mémoire 1 ha = 10000 ceps) et pour éventuellement favoriser l’utilisation d’engin mécanique voire de machines à vendanger. La moitié du vignoble bourguignon étendu met en œuvre des vendanges mécanisées. Notre hôte nous confirme que, malgré le nombre de pieds inférieur à une plantation classique, la production de raisin n’est pas diminuée. Je ne sais pas si ces vignes bénéficient d’une appellation régionale ? Deux trois mots sur les appellations en Bourgogne. Les classements datent pour la plupart des années 1936-1937. A la suite de la grave crise de phylloxéra du dernier tiers du 19ème siècle, il faudra attendre presque 50 ans pour que le vignoble retrouve de sa superbe. Des textes plus normatifs encadreront la culture de la vigne et la vinification suite à énormément de tromperies et d’abus à la fin de la Grande Guerre, au moment où la demande augmente. Basés sur l’identification des terroirs et des vins qui en découlent, l’INAO (Institut National des Appellations d’Origine) juste crée en 1935 définit des critères géographiques, géologiques et botaniques permettant un classement des vins de Bourgogne. L’élaboration de ces cahiers des charges des appellations a continué d’évoluer tout au long du 20ème siècle et continue encore aujourd’hui de s’enrichir (de se compliquer pensent certains vignerons ou experts). Ces appellations ne sont pas si arbitraires que cela et valident la qualité des vins telle qu’elle a pu être reconnue au cours des siècles passés. Cette classification fait donc apparaitre 4 catégories d’AOC. :

  • Les appellations « Grands Crus » (34 dans toute la Bourgogne viticole dont 33 sur les Côtes de Nuits et de Beaune). Ce sont des vignobles aux caractéristiques remarquables… Ils représentent 1% du volume produit. Sur les étiquettes, seul le nom du climat apparait sans mention d’une quelconque commune ni de lieu.
  • Les appellations « communales » ou « villages » en 1er Cru (44 en tout) qui correspondent à des parcelles (642) produisant des vins de grande qualité. Ils représentent 10% du volume produit. Sur les étiquettes, le nom de la commune de la parcelle apparait complété par le nom du climat et la mention 1er cru. Pas de différence de qualité par exemple entre le Cros Parentoux 1er cru et le Richebourg Grand cru à Vosne-Romanée quelques mètres plus bas sur la pente mais terroir différent et donc classement différent…
  • Les appellations « communales » ou « villages » tout court qui est la qualité inférieure et qu’on retrouve souvent sur le bas des pentes des Côtes… Ils représentent 37% du volume produit. Sur les étiquettes figure le nom de la commune et, éventuellement, le nom du « climat » apparait.

Pour les deux premières catégories il va de soi que la vinification se fait avec les raisins et jus d’une parcelle : il n’y a pas de mélange. On est au cœur du système du terroir où le vin est le résultat du travail du vigneron sur une parcelle à partir duquel il produit des vins ayant les caractéristiques liées à cette localisation précise, à ce climat.

  • Les appellations régionales : il s’agit de tout le reste du vignoble bourguignon. Il existe 7 appellations régionales qui représentent 52% du volume produit. Parmi ces appellations les Hautes Côtes de Beaune ou les Hautes Cotes de Nuits….

Les cahiers des charges de chaque catégorie sont très contraignants en termes de culture de la vigne et de méthode de vinification. Les rendements à l’hectare sont très cadrés comme les teneurs en alcool mini et maxi. Des vins d’une catégorie supérieure peuvent être sur la volonté du vigneron déclassés en une appellation inférieure à cause d’une qualité requise non atteinte. A ce moment-là on parle en Bourgogne de « repli » : un Clos de Vougeot passe Vougeot 1er cru ou Vougeot ou Bourgogne. Si on arrive à ce niveau de repli sur un Grand Cru alors c’est qu’il y a eu un gros problème 😊

Nous finissons la matinée en tournant autour de la montagne de Corton. Sur ses pentes est et sud-est nous découvrons les parcelles assez vastes des Grands Crus rouge en appellation Corton, ou blancs en appellation Corton-Charlemagne ou Charlemagne.

Les experts louent ces blancs pour leur profondeur, leur minéralité et leur persistance en bouche…. On veut bien les croire. Ces parcelles montent assez haut dans la pente mais descendent aussi assez bas. Les nuances tant en rouge qu’en blanc sont évidentes puisque les contextes géologiques sont différents.

Après la pause déjeuner nous reprenons les voitures pour une petite flânerie dans Beaune toute proche. Nous entrons par le nord-ouest de la vieille ville, en suivant l’empreinte des remparts qui subsistent ici ou là. Nous gagnons successivement la Collégiale romane Notre Dame, l’Hôtel de Ville installé dans l’ancien couvent des Ursulines bâti à la fin du 17ème siècle. Puis par un enchevêtrement de rues et ruelles surplombées de maisons d’époques différentes, de la Renaissance au XIXème, nous parvenons aux portes de l’Hôtel du Duc de Bourgogne, beau bâtiment à colombages du XIVème siècle qui est le siège du Musée des Vins de Bourgogne de Beaune.

Enfin à quelques pas de là, nous parvenons à proximité des Hospices dont nous ne voyons que la grande façade qui fait face aux grandes Halles. Ce tout petit tour nous a convaincu de la richesse du patrimoine bâti de cette belle cité.

Vite, nous reprenons les voitures pour regagner la tranquillité des vignes. Nous nous arrêtons à Pommard pour la dernière séquence de la journée. Nous entrons dans les Côtes de Beaune. Cette Côte occupe 13% du vignoble bourguignon et produit 11% du vin de Bourgogne. Nous prenons la direction de Volnay à travers les vignes au sud-est du village. Aucun Grand cru ici mais 28 « climats » classés en 1er cru. Pommard ne produit que des vins rouges qui comptent parmi les plus réputés de la Côte. Nous gagnons vite les hauteurs de Volnay par une longue montée à travers les vignes désertes là encore. Ici aussi, à Volnay, que 29 « climats » en 1er cru. Les rouges y sont plus fins et élégants qu’à Pommard. Je montre au groupe la maison de vendangeurs où j’ai logé en 2021 alors que je faisais les vendanges pour un propriétaire de Volnay, Henri Boillot. Nous revenons rapidement à Pommard par un petit PR qui serpente dans le bas des coteaux.

Nous sommes de retour au gîte à l’heure convenue pour participer à la découverte de la cuverie de notre hôte à Meursault, Jean-Philippe Fichet. Il cultive un peu plus de 8 ha de vignes dont il n’est pas propriétaire. Il les loue donc à plusieurs propriétaires. Il produit en majorité des vins blancs et récolte un peu de Pinot noir sur 21 ares (1 are=100 m2) à Monthelie, petit village au-dessus de Meursault. De ces quelques ceps il tire un Monthelie 1er cru « Les Clous ». Tout le reste de sa production est classée en appellation Village Meursault et en appellation régionale Bourgogne. Il produit des vins en son nom propre depuis 2006 mais travaille la vigne depuis les années 1975. Il a installé sa cuverie dans les anciennes écuries du relais de Poste devenu le gîte où nous logeons. Il a consenti de gros investissements pour construire ses 4 grandes salles qui communiquent par d’imposantes portes coulissantes. Il nous explique schématiquement les étapes de la vinification en blanc :

  • Tri des raisins à l’entrée de la cuverie sur une table de tri
  • Pressage des raisins (Chardonnay)
  • Mise en cuve du moût (jus) de raisin au froid pour séparation du jus de ses bourbes (résidus de pellicules de pulpe…)
  • Extraction du jus clair pour mise en cuve ou fûts de chêne pour fermentation (transformation du sucre en alcool). Notre hôte utilise les deux récipients. Les fûts plutôt pour ses Villages…. A cette étape du processus, le risque le plus grand pour sa production est l’arrêt inopiné de la fermentation….
  • Elevage en cuve ou fût pendant 10 mois environ (plus pour les rouges et beaucoup plus pour les Grands Crus)
  • Nombreux contrôles pendant cette période d’élevage : degré alcoolique, acidité- il est assisté de son œnologue  
    • Le vigneron peut procéder à des ouillages (le récipient cuve ou fût doit toujours être rempli à ras bord pour éviter la constitution de poches d’air)
    • Il peut également procéder à des soutirages pour séparer le vin des lies au fond du contenant
  • Mise en bouteille après filtration
  • La grande différence entre vinification de blancs et de rouges est la macération pré-fermentaire introduite par Henri Jyer (voir jour 1). Il s’agit de laisser macérer les grains avec ou sans leur rafle (le support des grains de raisin) dans une cuve afin que les tanins présents sur les peaux des raisins puissent être extraits. A froid parce que la cuve est refroidie pour empêcher le début de fermentation qui se lancerait naturellement sinon. C’est cette macération qui va colorer le moût et donner son rouge au vin. A l’issue de cette macération, la fermentation peut se lancer à partir des levures naturellement présentes dans les peaux qui vont transformer les sucres en alcool… Pendant toute la durée de la cuvaison, le vigneron procède au remontage (arrosage du chapeau de raisin formé en haut de cuve avec le jus remonté) et au pigeage qui vise à enfoncer le marc dans la cuve pour que les mélanges jus-matières solides continuent. A l’issue de la fermentation, on extrait le jus de la cuve (jus de goutte) et on presse le marc pour obtenir le jus de presse (plus riche en tannins). Les deux jus sont généralement assemblés dans des fûts de chêne et l’élevage commence. Il n’y a alors plus de différence dans le processus de vinification entre rouge et blanc. On voit donc bien que la vinification des blancs est plus « simple » que celle des rouges 😊

Il nous fait ensuite déguster trois ou quatre vins de millésimes différents : des vins jeunes (2022) et une bouteille du millésime Meursault 2017.

Les différences au goût sont grandes même pour un non connaisseur comme moi. On a en bouche des arômes plus complexes que sur les vins jeunes. Et l’acidité en moins ! J’ai identifié des arômes de fruits secs…  Puisqu’il produit peu et qu’il exporte près de 60% de ses vins, les Atlassiens qui auraient aimé ramener du vin en sont pour leurs frais : il n’y a pas de vin à vendre. Tant pis, on se rabattra sur le vin du cubi 😊 Si on se livre à un petit calcul pour calculer le nombre de bouteilles qu’il peut produire par millésime, on arrive au chiffre (très approximatif) de 48000 bouteilles : (8 ha * 45 hl en moyenne par ha * 100 l)/ 0,75 l. C’est peu !

La leçon a duré plus de deux heures et il est temps d’aller préparer le dîner. Après un bon repas et une belle fin de match Irlande-All blacks, il est temps de plier les gaules pour être en forme pour notre troisième journée.

Jour 3 :

  • Boucle autour de Meursault : 22 km – 480m D+ – 6h48 déplacement

L’objectif du jour est la découverte de nos derniers Grands Crus, en blanc cette fois-ci. Nous commençons par une déambulation dans Meursault avec la découverte de sa belle église romane du 14ème à la flèche élancée que l’on voit de loin.

Nous progressons sur le flanc des coteaux qui surplombent le village en direction d’Auxey-Duresses installé à la sortie de la combe de Saint Aubin.

A partir de Meursault, nous sommes au pays du Chardonnay et des vins blancs. On dit que les Blancs de Meursault sont les plus grands Blancs de Bourgogne mais que les Blancs de Puligny sont les plus grands vins Blancs du monde…. Ils représentent près de 60% du volume produit en Bourgogne contre 29% pour les vins rouges et rosés. Le Blanc se vend mieux désormais que le Rouge, en France et surtout à l’International. A Auxey, nous admirons trois grandes cuveries identiques typiques des années 30. Nous abandonnons pour 2 heures environ les vignes pour parcourir du nord au sud le plateau de Montmeillan qui domine toute l’appellation de Meursault à près de 430 m. Le petit coup de cul du départ réveille un peu nos instincts de randonneurs un peu endormis depuis deux jours 😊 En fin de plateau, nous débouchons à l’est de Gamay au niveau d’un amas rocheux visible de loin : Roche Dumay.

Une petite désescalade et une traversée des vignes nous amène sur un chemin d’exploitation qui va nous conduire à Chassagne-Montrachet. Nous déjeunons en bord de vignes au sud du village. Nous sommes passés sous une grande carrière toujours en exploitation. Elles ne manquent pas tout au long de ces Côtes. La plus grande et célèbre est celle de Comblanchien en Côtes de Nuits, au sud de Nuits Saint Georges. Les grands blocs de calcaire dur qu’on y a extrait ont permis la construction des immeubles Haussmanniens et l’Opéra Garnier à Paris. Au début du 20ème, les carrières occupaient plus de main d’œuvre que la vigne à Meursault…. Peu de monde à Chassagne que nous traversons après le repas. Le vin de l’année est en cours de gestation bien à l’abri de l’air dans des fûts ou des cuves. Les grands travaux de la vigne sont en suspend et ne reprendront qu’en novembre-décembre avec la pré-taille, le brulage ou broyage des sarments et le buttage qui vise à protéger le pied des ceps de terre. Le gros du labeur, la taille, commencera après la St Vincent en janvier. La vigne est une liane qui n’en finirait pas de s’étaler si l’homme n’intervenait pas. Il faut maitriser la végétation pour assurer une bonne fructification. A l’issue de la taille (Guyot principalement en Bourgogne) il ne reste plus sur le cep qu’une branche-baguette avec de 6 à 8 yeux et un courson (courte branche) avec 2 yeux. En avril, il faudra courber cette baguette sur le fil inférieur et l’attacher avec de petites agrafes spéciales. Elle portera les branches fructifères. Chaque cep est un cas particulier et il faut une sacrée expérience pour décider de ce qu’il faut couper ou pas : rappelez-vous, il y a 10000 ceps par ha ! La taille ne prendra fin qu’en mars.  Les labours et l’amendement des sols se fera en mars. En mai-juin, il faudra procéder au relevage des tiges et à l’accolage (fixation des sarments sur le palissage) pour faciliter les travaux sur les rangs et donner de l’air aux jeunes grappes. En juin, on procède à l’effeuillage pour favoriser l’ensoleillement des jeunes grains qui apparaissent et pour faciliter la vendange deux ou trois mois plus tard. Je n’évoque pas tous les traitements qui vont se succéder à partir de l’apparition des feuilles jusqu’au mois de juillet et août pour lutter contre tous les risques de maladies de la vigne comme l’oïdium ou le mildiou…. De plus en plus de domaines sont maintenant conduits suivant les méthodes de l’agriculture biologique voire en biodynamie mais pas que….

A la sortie de Chassagne, nous entrons sur le vignoble de Puligny-Montrachet et de nos derniers Grands Crus : Montrachet, Chevalier-Montrachet, Bâtard-Montrachet, Bienvenues-Bâtard-Montrachet et Criots-Bâtard-Montrachet.

Les trois premiers occupent des parcelles de 8 à 11 ha environ. La Route des Grands Crus les traverse et nous devons faire attention aux voitures des touristes (comme nous). Peu après, nous parvenons sur la grande parcelle du Clos La Mouchère, 1er Cru à Puligny que j’avais vendangée en 2021. Elle n’est pas divisée entre plusieurs propriétaires comme d’autres 1ers ou Grands Crus. On parle alors de Monopole et cette mention apparait sur les étiquettes. C’est le vin que j’avais offert au cours d’une réunion d’animateurs… Nous reprenons un peu de hauteur pour repartir vers Meursault. Nous croisons encore une carrière… Nous parvenons assez rapidement aux voitures à Meursault.

J’avais prévu de quitter le gîte à 16 heures. C’est exactement l’heure à laquelle nous quittons à regret ce bel endroit. Nous serons dans 3 heures à Clermont, à l’heure donc pour assister à la défaite de l’équipe de France de rugby 😊

Merci à Marie-Thé et Sandrine pour leurs photos.
Groupe très sympathique dont l’esprit d’entraide m’a facilité le déroulement du séjour. Très attentifs à toutes mes explications, ils ont appris pas mal de choses sur cette région, la vigne et le vin. La préparation du séjour m’a également beaucoup appris sur le sujet : c’est ce que j‘ai essayé de restituer dans ce compte-rendu.

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